16 décembre 1995
"A
l'école, je détestais le sport. Toutes les occasions étaient bonnes pour me
faire dispenser". Les
choses ont bien changé depuis les bancs de l'école. Entre temps, Bernard
Roth est passé sous les drapeaux, découvrant les joies du marathon. La
passion de la course ne l'a plus jamais quitté. "je
cours dès que je peux. 20 kilomètres. 42 kilomètres..."
Mais en entrant dans la société
familiale qu'a reprise son père Edgar, au lendemain de la seconde guerre
mondiale, Bernard Roth succombe à un autre virus : le bois. Incurable, disent
ses proches. Aussi, quand vient le moment de célébrer l'entrée de
l'entreprise dans son deuxième centenaire, au début de l'année 1995, le
chef d'entreprise fait le pas déterminant qui le mènera vers son vieux rêve
: le toit du monde. Parvenu au sommet de l'Aconcagua, son premier geste sera
de se faire photographier, épuisé mais heureux, brandissant un fanion
proclamant : "j'aime le bois".
Tenir
bon
"Dans
une conjoncture difficile, j'ai voulu me donner une leçon de ténacité. Elle
était aussi valable pour toute ma société. C'est à coup de volonté que
nous trouvons de nouveaux débouchés et de nouveaux clients",
veut croire Bernard Roth. Dans sa famille, ces mots ont un sens
particulièrement profond. Son grand-père Abraham et son oncle Paul ne sont
jamais revenus d'Auschwitz. Seul son père, Edgar, a pu survivre et redonner
vie à l'entreprise réduite à néant par les allemands. Il est décédé en
1981 : son fils lui doit tout.
Comme si la vie devait être vécue en sur-régime, l'héritier de la
quatrième génération de négociants en bois cumule les responsabilités et
les initiatives. Juge consulaire au tribunal de commerce de Strasbourg,
trésorier du comité Alsace des conseillers du commerce extérieur,
trésorier national de la fédération française du bois, membre de la
chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin, membre du
conseil de la Banque de France de Strasbourg : Bernard Roth garde du temps
pour le bénévolat dans une association caritative. Et pour sa femme et ses
trois enfants.
Plan
de bataille
"Notre
métier souffre de la crise générale, notamment du bâtiment", soupire
le PDG d'Edgar Roth. Dans ce contexte, la défense du bois contre les attaques
virulentes des matériaux de substitution comme le PVC et les dérivés du
pétrole est devenue le cheval de bataille de Bernard Roth. "Le bois au
moins est écologique",
lance-t-il. "Récoltable,
renouvelable, recyclable, et neutre en gaz carbonique, il arrive en tête des
éco-bilans énergétiques".
A écouter Bernard Roth, le bois devient surtout le seul matériau de
construction sain... Malgré la crise, Bernard Roth croît aux cycles économiques, même s'ils
sont de plus en plus longs. "Il
y a un retour affectif vers le bois"
confie-t-il pour se convaincre.
La
nature est exigente
Avec
19 salariés, la société "a
toujours été bénéficiaire"
explique Bernard Roth. Plus de 30% de son chiffre d'affaire est consacré à
l'export, essentiellement vers l'union européenne. Son métier : produire des
stocks disponibles pour approvisionner les clients à flux tendus. Ses clients
: le bâtiment, la menuiserie, le meuble, les moulures, les parquets ou les
échelles.
"Ce
n'est pas facile, la nature ne se laisse pas faire",
commente le PDG. Il fait donc appel au bois français, mais importe également
d'Amérique du Nord et des pays tropicaux. Aux expéditions du père à
l'autre bout du monde, le fils préfère encore le coup de fil et le fax, tout
aussi efficaces. Et celui qui a touché le ciel à plus de 7000 mètres
au-dessus de la mer ajoute dans un sourire : "c'est
peut-être paradoxal, mais je déteste les voyages".
|